09.04.2014
MERLIN ET LA VIEILLE FEMME
Aux carrefours il soufflait des vents maternels
Comme la rose qui saignait le ciel
La lumière est d’amour et d’héroïsme,
Lumière sanglante qui fait crouler l’orgueil
Sur une mule près des charognes
Où ma mère galope, veux-tu voir mourir
Ce soleil de chair comme nulle fleur
Ce jour-là, les voies vertes revenant de l’ouest
Guettaient les vents, le soleil, les nuages
Suivant l'ombre des berges s'étalaient tes couleurs
Et soudain le printemps dans la plaine déserte
Feignant d’être le rire, la vie et l’éternelle cause,
Fille de tes gestes blancs en jouant la douleur
Sous une chape s'évadait et l’antique Merlin
Dansant dans les lilas remuait son cercueil
Dont le destin glacé nourri des cataclysmes, d’ossements
Des malheurs suivant un rythme d’herbes, les pâles amants
Joignant leurs mains drues de fleurs sans épine
Apportaient des poils à petits pas, influaient sur la danse
Proclamaient l'univers de monuments tremblants
Leurs doigts crochus voulaient défleurir l’aubépine,
Peuplaient sinon leur ventre, l’entrelac ;
Luisant depuis cent ans.
Et puis après, s’en vint très tristement l’amante
Seul laps d’amour quand les oiseaux étirent
Des fripes et des fantômes pendant les solitudes
Et j’ai vieilli vois-tu, j’eusse été si tôt las,
Que le vent ton mort-né, et mon violent rival
Pour nous se déclare porcelet.
Enfin si beau, je danse
sur cet Avril en fleurs.
Le soleil, un mirage d’enfants-dieux
Exprimait nos cauchemars. On saignait.
La pauvre confidente en regardant les anges
qui menaient dans sa gorge
son chant de vieille morte
Se frappait la poitrine, le front en feu
Nimbé d’un corps laissa tomber la mule.
Ô ma semblable, dommage !
On n’a pas refleuri l’univers.
La dame qui m’attendra sur le chemin de Rome
Se prénomme Marjolaine.
ERIC CHAUVENNE : "Poème en plis" extr. de "L'âpreté poétique", édition Terato, 1964, Limoux.
Photo: © C.A.H.L. 1964 - Confrérie d'Art et d'Horticulture de Limoux -
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Publié dans Ambiguïtés, Amour, Art contemporain, Erotisme, Littérature française, Musique traditionnelle, Photographie, Poésie moderne, Sacré, Traditions, Voyage | 04:13 | Lien permanent | Imprimer